SPECTACLES A VOIR AVIGNON 2016
SPECTACLES A VOIR AVIGNON 2016 Dans les rues de la cité des Papes, les parades et les distributions de tracts se poursuivent. Et dans les salles du Off, il y a toujours de belles découvertes à faire. Voici mes dernières, résolument hétéroclites : Pour retrouver son âme d’enfant: Julien Cottereau dans « Imagine-toi » Clown, mime, bruiteur, Julien Cottereau offre, sans un mot, un concentré de rire et d’émotion dont on sort l’esprit léger et le sourire aux lèvres. Sa poésie nous serre le coeur avec tendresse, et sa performance corporelle et sonore (sans le moindre accessoire) nous épate. Avec son chapeau à la Peter Pan (sans la plume) et son costume beige de clown mal fagoté, ce comédien reprend son spectacle « Imagine-toi » qu’il n’a cessé de faire évoluer et nous emmène dans l’imagination sans limite d’un balayeur solitaire. Qu’il joue avec un chien, qu’il tombe amoureux ou qu’il se débatte avec un monstre, la précision avec laquelle il parvient à tout ré-imaginer nous emmène dans un univers enchanteur. Julien Cottereau, dont on lit sur le visage la part d’enfant qui est resté en lui, a aussi le don de faire participer des spectateurs avec une empathie et un charme rares. Dans ce monde de brutes, cet homme est un extra-terrestre à voir (ou à revoir) d’urgence. « Imagine-toi » jusqu’au 31 juillet à 15h10 au théâtre Ninon et « Lune air » jusqu’au 31 juillet à 20h55 au théâtre de La Luna Pour découvrir que le rugby peut se transformer en spectacle : Cédric Chapuis dans « Au-dessus de la mêlée » Nous avions été emballés par son précédent seul en scène « Une vie sur mesure » (également à Avignon). Pour son nouveau spectacle, Cédric Chapuis fait un pari audacieux en choisissant de raconter l’itinéraire de Bastien, poussé par son père à pratiquer le rugby pour « devenir un homme ». Entraînements, compétitions, vie du club, camaraderie, troisième mi-temps, le comédien nous raconte quinze années de vie (de 5 à 20 ans) au Racing club de Brignac et parvient à capter l’attention des plus réfractaires à l’univers du sport amateur, ou du sport tout court. Sa force ? Sa capacité à raconter une histoire faite d’autodérision, d’émotion, d’humanité, de pudeur, voire de candeur. Bien écrit, habilement mis en scène, « Au-dessus de la mêlée » peut paraître parfois naïf dans sa manière de magnifier un sport qui véhiculerait toutes les plus belles valeurs (amitié, engagement, intérêt du groupe, dépassement de soi) mais a le mérite de la sincérité. Cédric Chapuis parle de son vécu, de sa jeunesse sportive, et incarne tous les personnages de cette comédie amicale : les copains, l’entraîneur, le coach physique, le maire, etc. Ce seul en scène, qui mériterait juste d’être un peu resserré (l’histoire du premier amour ralentissant un peu le rythme), réussit le tour de force de transformer une aventure sportive en une aventure humaine qui s’adresse à tous. « Au-dessus de la mêlée, jusqu’au 30 juillet (les jours pairs) à 10h50 au théâtre Pandora Pour rire en chansons grâce aux délires de Constance dans « Gerbes d’amour » Cette fille est dingue. Elle l’avait déjà prouvé lors de ses deux précédents one-woman-show – « Les mères de famille se cachent pour mourir » et « Partouze sentimentale » – dans lesquels elle croquait des portraits de femmes névrosées désespérément drôles. Cette fois, cette humoriste s’est mis en tête de raconter des horreurs en chansons et d’être accompagnée sur scène par la musicienne Marie Reno, aussi grande, brune et impassible que Constance est petite, blonde et survoltée. Résultat : un duo déjanté, mis en scène par l’un des humoriste les plus fou du moment, Didier Super. Avec un culot monstre et toujours le choix assumé – rare sur les scènes d’humour – du déguisement, Constance et Marie se sont donnés pour mot d’ordre de « traiter le mauvais goût avec le bon goût ». Dans « Gerbes d’amour », tout y passe : le viol, l’infanticide, les homme violents, l’alcoolisme…Paroles acides et insolentes, il faut voir Constance raconter une soirée trop arrosée ou dénoncer le racisme anti-picard sur un air de souk ou encore se moquer des rappeurs « les mecs c’est trop des putes, si t’as du cash, ils sont en rute » pour se dire que rien n’arrête la folie de cette fille qui a Nina Haggen pour idole. « Gerbes d’amour », jusqu’au 30 juillet à 22h30 au théâtre Le Paris Pour saluer une performance d’acteur : Brice Hillairet dans « Ma folle otarie » C’est vraiment une drôle d’histoire. Celle d’un homme timide, effacé, à la vie morne et sans éclat, dont les fesses vont soudainement grossir dans des proportions monstrueuses. Cette fable contemporaine, écrite et mise en scène par le prolifique Pierre Notte, tient sa force dans l’interprétation remarquable de Brice Hillairet. Dans la petite salle-chapelle du théâtre des Halles, sans le moindre décor ni accessoire, ce jeune comédien nous emporte dans sa folle aventure. Mal dans sa peau, pataud, il fuit le monde des hommes, aux yeux desquels il est devenu un monstre, jusqu’à trouver refuge auprès d’une otarie et parvenir à briser ses chaînes à l’issue de cette cocasse épopée. Monologue haletant et inventif, tout autant dans l’écriture que dans le jeu, « Ma folle otarie » est l’histoire d’une émancipation, drôle et émouvante, contée par un comédien au panache fou. « Ma folle otarie », jusqu’au 28 juillet à 14 heures au théâtre des Halles Sandrine Blanchard